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VOX CONCORDIA

 

 

 

J'ai eu 60 ans en mai 2025 et j'ai fait dans ma vie de chanteur, toutes les erreurs qu'il était possible de faire.

 

J'étais ce qu'on appelle un surdoué vocal. Naturellement, avant mes 20 ans, j'avais un ambitus qui allait du contre ut grave au contre Fa dièze. J'ai fais mes premiers sons lorsque j'avais une quinzaine d'années. J'écoutais l'opéra depuis mon enfance, et dans ma famille, l'opéra était une religion. Ma mère, soprano amateure, m'envoya chez un professeur, lui demandant si ma voix  cela le coup. Elle lui dit que j'avais une voix hallucinante, et qu'elle me prenait gratuitement. Elle n'avait aucune technique, était la femme d'un professeur de chant décédé dont elle était la pianiste.

Elle me disait : « … fait A jusqu'au fa, et O au dessus... ». Par contre, avec elle, j'ai mangé du solfège jusqu'à plus soif !!! Merci Marie Louise.

J'ai fait mon premier concert avec orchestre symphonique lorsque j'avais une vingtaine d'années, sans technique aucune. J'étais orgueilleux, je n'écoutais aucun conseil et je beuglais comme un âne, des contre ré à faire crouler la maison, qui soulevaient l'admiration des autres chanteurs. Ça n'a pas duré longtemps. Rapidement, alors que j'étais dans les chœurs de l'armée comme premier ténor, j'ai perdu cette voix magnifique. En effet, pour chanter dans les choeurs, il faut savoir vraiment ce que l'on fait car cela n'a rien à voir avec le travail de soliste. Il faut apprendre à chanter piano et apprendre l'humilité, ne pas vouloir à tout prix avoir une voix plus grande que le voisin. J'ai alors gagné le gros lot : Fente glottique avec début de nodule. C'est durant cette période que mes recherches ont vraiment commencé.

j'ai supporté toute la nullité et la dangerosité possible de certains professeurs en qui pourtant j'avais mis ma confiance. 34 au total, au 4 coins du monde. Oh, tous n'étaient pas mauvais, mais j'étais arrivé dans un tel état de détresse et de manque de confiance que j'étais complètement perdu. Entre ceux qui me disaient de chanter dans le masque, en rentrant le ventre, et ceux qui me disaient de ne surtout pas penser au masque et de sortir le ventre, mon Dieu, comment était-ce possible? Combien, Dieu m'en est témoin, j'ai versé de larmes et souffert. Je ne comprenais plus rien et j'étais désespéré, car le chant était ma vie, et il était pour moi impossible d'envisager une autre voie ! J'en arrivais à avoir une position vocale différente chaque jour de la semaine !

Après une dizaine d'années de recherches et de travail, même si je n'avais jamais retrouvé le naturel de ma voix originale, cela fonctionnait suffisamment bien pour rentrer dans une grande agence et chanter. Cependant, ma voix faisait quand même ce qu'elle voulait de moi, et je me payais des tracs épouvantables, je ne souhaite cela à personne. Du coup, en 1994, de fis le concours de choeurs de Radio France, je fus pris tout de suite et j'y restais 17 ans, jusqu'au deuxième épisode ou une fois de plus, je perdis complètement ma voix. Alors cette fois ci, plus rien. Un petit courant d'air sur une tierce, complètement détimbré.

 

Le 7 mai 2006 à 18h50, en ramenant mon fils chez sa mère, je fus victime d'un choc frontal sur l'autoroute A71, a hauteur de l'aire de Doyet, avec une personne âgée atteinte de la maladie d'Alzheimer qui avait échappée à la surveillance et avait subtilisé les clés d'une voiture. Il est entré sur l'aire d'autoroute, et est reparti pour ou il était entré. J'arrivais en face, je l'ai pris à près de 160 km/h. Bilan : 14 fractures ouvertes au niveau des jambes, arrachement de la rate, pneumo thorax gauche, toute la cage thoracique avait reculée de 7 centimètres avec toutes les cotes cassées (airbag), grave trauma crânien. Je n'avais pas perdu conscience, je voyais mon fémur qui sortait de ma jambe et qui était planté dans la portière et pourtant, je ne ressentais aucune douleur. 4 heures de désincarcération plus tard, j'étais hospitalisé, ceci durant prêt de 5 ans en subissant pas moins de 14 opérations et intubations. Un staphylocoque à aussi voulu être de la partie. Je ne cicatrisais pas et ne consolidais pas non plus. Cette horreur a été une bénédiction. Dieu l'a mis sur mon chemin pour m’obliger à avancer, apprendre l'humilité, la valeur de la vie et des petites choses. Seul l'amour me guidait alors, je n'avais plus rien, je n'étais plus rien. Alléluia. Merci. J'ai pu alors commencer à vraiment travailler sur tous les plans. La j'ai compris que les larmes étaient là pour nous transformer en œuvre d'art. A nous de choisir qui l'on veut devenir. Il ne faut pas demander à ne plus souffrir, il faut juste demander la force et la persévérence, afin de porter au mieux les expériences pour lesquelles nous nous sommes incarnés. La reconstruction sur tout les plans, ma reconstruction vocale à fait aussi de moi le professeur que je suis aujourd'hui. Maintenant, vous savez un peu plus qui je suis et une partie de mon histoire, alors au travail.

 

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Je ne développerai pas dans ce petit livre l’interprétation.

Il s'adresse principalement à ceux qui se destinent à la profession de chanteur lyrique. Les amateurs s'en inspireront, sans prendre pour eux la rigueur que je peux exprimer dans les propos destinés aux professionnels.

 

Il m'arrivera de faire des répétitions, de dire parfois plusieurs fois la même chose dans des formes différentes. En fait, si j'ai une idée, je fais un paragraphe. Je n'en supprime aucun, donc il y aura des redondances. J'ai pensé que parfois, une chose est dite, mais pour qu'elle soit imprimée dans l'esprit, il faut répéter, répéter, encore répéter.... Bref, c'est de la pédagogie.

 

Première chose, pourquoi apprendre à chanter ?

 

C'est simple, pour faire le maximum de musique, avec le maximum de portée du son et le minimum d'efforts. Dans ces conditions, il résultera du travail une voix qui résonne très haut dans la tète avec un aigu et des nuances faciles. On se fera plaisir, on fera ce que l'on veut, facilement.

Les deux principales étapes de l'éducation du chanteur pour en arriver là sont en premier le dégagement de l'espace derrière la langue, nécessaire au passage de la voix du grave à l'aigu, et en second, l'édification de la résonance haute, qui s'oppose au forçage de la voix devant, comme souvent les Français le font. Les nasales du Français invitent à ça, hors, dans la grande technique italienne dont tout le monde à entendu parler, il n'y a aucune nasale !! Aucune nasale n'existe en Italien. 

 

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Un grand danger guette l'enseignant. L'orgueil et le désir de reconnaissance.

Dans ma quête artistique, j'ai donc rencontré pas moins de 34 professeurs. Certains étaient de véritables gourous. Sympathiques et souvent au grand cœur, mais malheur à celui ou à celle qui ne partageait pas à 100 % leur opinion sur la technique vocale ou le chant. Ce genre de prof aura une capacité à vous embobiner absolument colossale. Une tchatche digne d'un marchant ambulant, et si vous n'y prenez pas garde, alors vous risquez de vous engager dans une pente qui au mieux, vous volera de nombreuses années, au pire, vous emmènera chez le phoniatre. Pourquoi ? Car ce genre de professeur applique le plus souvent la même méthode à tout le monde. Que vous serriez le son, ou que vous le grossissiez, que vous chantiez dans la gorge, dans le nez ou n'importe comment, de toute façon, vous aurez droit aux mêmes exercices, aux mêmes recommandations, vous aurez un piège béant devant vous. Le bon prof est celui qui aura des exercices différents pour chaque typologie vocale. Vous ne devrez pas vous étonner si ce professeur tient à un camarade, un discours différent, voir carrément opposé à celui qu'il vous tient à vous. Pourquoi ? Parce que vous n'avez ni la même voix, ni les mêmes qualités, ni les mêmes défauts, ni la même histoire que votre camarade. De plus, une image peu fonctionner pour un élève, et pas pour un autre. Donc, prenez garde !!!

Autre chose, un bon prof ne vous dira jamais par exemple : «  ….Vous ne savez rien, il faut tout reprendre à zéro.... », ou bien encore : « ...Mon Dieu, vous avez travaillez avec elle, ou avec lui.... ». Dire ce genre de chose est inutile et contre productif. Cela blesse votre élève et on a besoin de tout sauf de mortifère quand on veut chanter.

 

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Les deux défauts principaux que l'on peut constater en tant que professeur sont, des voix grossies, sans résonances hautes, où les voyelles sont pâteuses, on appelle cela aussi, voix « houahoua » (souvent consécutives à la technique de l'affondo mal compris ou mal appliqué), ou bien à l'opposé, des voix blanches, sur-timbrées, serrées, absolument pas connectées au corps ou encore, coincées dans le nez, ou dans la gorge, ou les deux, bref, rétrécies ou atrophiées. J'ai souvent entendu dans les concours de conservatoires, des 3e cycles chanter un air d'opéra avec des voix complètements blanches, gorges fermées. Il est vrai qu'avec vingt minutes de cours par semaine la première année, aucun miracle n'est possible, même en présence du plus grand pédagogue sur terre !!!

 

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J'ai mis des années à vraiment réaliser l'importance de la descente du larynx en montant dans l'aigu, dans une sorte de grande ouverture avec libération du pied de langue. Je le savais, j'en parlais assez souvent, mais ce n'est qu'en le trouvant moi-même que j'en ai pris vraiment conscience. Quelle claque, car cela déclenche l'appui du souffle !! Un autre monde s'ouvre !!!

 

La voix à forte intensité, par exemple la voix lyrique, est le résultat d’un travail, d'une intention, entre autre, des centres de commandes cérébrales qui dirigent la musculature. Il faut penser le travail vocal comme un entraînement dans une salle de musculation. Ne jamais oublier que les plis vocaux font deux grammes et que nous avons cinq kilos de muscles abdominaux. Imaginez le mal que l’on peut faire si cela est mal géré. C’est pour cela qu’il faut être prudent et progressif dans le choix des partitions et des rôles, comme on doit être progressif dans le choix des poids à la salle de musculation. Le but sera la plus grande efficacité avec le moins de poids possible sur la gorge.

 

On travaille de 1 à 9, jamais 0 qui est l'abandon, jamais 10 qui est le forçage.

 

La réussite, c'est le travail. Fernando De Lucia, le professeur du Célèbre ténor Georges Thill disait : « Si je ne travaille pas un jour, je m'en aperçois. Si je ne travaille pas deux jours, ma femme s'en aperçoit. Si je ne travaille pas trois jours, le public s'en aperçoit. Vous pourrez avoir le geste vocal le plus sain, s'il n'est pas exercé tous les jours, vous n'aurez ni la sécurité, ni la facilité absolue, ni la régularité. La voix est un muscle, ne l'oubliez jamais, c'est en le travaillant qu'on le développe et qu'on l'entretien.

 

Avec l'age, la voix peut s'altérer et perdre sa souplesse. Chez certains individus plus que chez d'autres. De même qu'avec l'age, le corps s'altère, les fesses commencent à tomber, on prend du ventre, et bien pour la voix, c'est pareil. Le seul remède ? Une bonne technique et un travail continu. Un crétin à dit à une de mes élèves de 70 ans, qu'à son age, il était inutile de prendre des cours. Je peux affirmer ici que s'il savait de quoi il parle, il comprendrait qu'au contraire, c'est bien parce quelle avance en âge, qu'elle doit encore plus travailler et se faire contrôler. A son âge, sa voix à gardée sa pureté et sa jeunesse, ne bouge pas et elle peut chanter des heures sans se fatiguer.

 

Il faut dix ans pour faire une technique, avec une intelligence affûtée et de la persévérance. Si on est pressé, ou comme moi, que l'on s’amuse à chanter Werther à 18 ans, que l'on change de professeur tous les quatre matins ou que psychologiquement, on est fragile car on se sert de notre voix pour être reconnu et non parce que l'on vit pour la musique, alors on peut doubler voir tripler le temps des études. J'ai connu des voix magnifiques, extraordinaires, qui auraient pu faire des premiers plan à la Scala ou au Met en quelques années, mais dirigées par des psychés défaillantes. Ils n'ont jamais rien fait. On ne peut malheureusement blâmer personne. On n'a l'histoire que l'on a et on fait ce que l'on peut avec ce que l'on a. Fernando De Lucia, selon Mario Podesta, avait mis dehors un baryton Verdi à la voix d'or. « Non a cervello !! ».

 

Seul l'amour de la musique compte. On y met tout notre cœur, toute notre âme, c'est notre raison de vivre. Alors, et seulement alors, on a une chance d'être un chanteur qui mérite ce nom. Si votre but c'est de ne faire que des sons, passez votre chemin, vous ne m’intéressez pas. La technique est un moyen, pas un but. Elle est le moyen de laisser parler votre âme et votre soumission au compositeur. Elle est le moyen de réaliser en conscience et facilité vos intentions musicales. De faire parler votre intelligence musicale, et à ce titre, elle est incontournable. Mais je le répète, elle ne sera toujours qu'un moyen.

 

L'intelligence musicale est indispensable. C'est un don extraordinaire au même titre que le niveau de qualité de l'organe vocal qui est en votre possession. Vous pouvez avoir la voix du bon Dieu, si vous vous contentez de battre la mesure en faisant les notes, alors vous n'êtes pas un chanteur, vous faite du solfège chanté avec paroles. Pour chanter devant Mami à la fin du repas de famille dominicale, ce sera parfait !!

 

La respiration doit être costo-diaphragmatique, en enlevant tout défaut de respiration inversée (ventre qui rentre à l'inspiration avec la poitrine qui se soulève). Le débutant doit apprendre à ressentir son périnée qui a une grande importance dans le geste vocal chanté, à fortiori dans le geste vocale à forte intensité comme dans le chant lyrique.

 

Développer à tout prix le souffle très tôt ne sert à rien tant que la gorge n’est pas ouverte, larynx en bas mais flottant. Quand la gorge est devenue libre, sans l'obstacle du pied de langue crispé par exemple, on ressent alors l’appui du souffle et on ne peut plus s’en passer. On peut alors, par un ressenti progressif donné par le travail et l'habitude, doser la pression, l'effort sur les muscles abdominaux selon le besoin de hauteur, de nuance, ou les deux. Il n'y a alors plus de passages. Quand on a senti cela, on peut vraiment commencer à développer le souffle.

 

Quand la mémoire musculaire de la sensation est faite là dessus, alors commence l’entraînement physique pour développer la musculature respiratoire : Travail du dos, de la ceinture abdominale, de la ceinture scapulaire, par l’exécution d'une gymnastique drastique et adaptée. N'oubliez jamais que c'est le chant qui développe le chant, sinon tout les grands sportifs seraient de grands chanteurs. Néanmoins, la musculature du chanteur demande un grand entraînement. Là, je sais que beaucoup vont être contre ce que je dis. Il y a un facteur incontournable qui est la détente et l'absolue nécessité de ne pas nuire. Le trop de travail corporel dans l'inconscience du « pourquoi, comment et pour quel effet », peut engendrer des tensions parasites. Mais encore une fois, tout dépend de l’élève que vous avez en face. Ne jamais faire de généralités absolues, c'est le meilleur moyen de faire des erreurs. Le yoga Iyengar, la méthode Alexander ou Feldenkreis, sont des aides formidables pour les chanteurs.

 

L’air comprimé dans les poumons rencontre un obstacle appelé glotte, qui est un sphincter, composé d’une masse de chair, de peau, de muscles d’une certaine épaisseur. L’augmentation de la pression, comme dans un pneu, va repousser cette masse d'air sous les plis vocaux (pression sous glottique) et permettre la sortie d’une certaine quantité de groupes de molécules d’air appelées PUFF. Ce nombre de puffs qui passent en une seconde, et qui vont bousculer la masse d’air en état stationnaire dans la bouche va produire une onde qui sera par exemple de 440 hz sur le la 3, 880 hz sur le La 4 etc...

A ce sujet, vous pouvez aller voir sur le web la description du phénomène de Bernoulli.

 

« ...Dans un fluide s'écoulant horizontalement, la pression du fluide aux points où sa vitesse est élevée, est plus faible que la pression du fluide aux points où sa vitesse est plus faible... »

 

 

L’humain « conscient », n’est pas responsable de la hauteur du son ni du son même. Ce n’est qu’une suite de phénomènes pneumatiques, ondulatoires et acoustiques.

 

L’attaque du son doit se faire de glotte, dans l’étonnement, la surprise, comme un contretemps. Alors, l’attaque est dans l'ouverture, précise, pneumatique et optimum, sans effort « ...Oh!..». Suspendu, pneumatique... Attention, gorge largement déployée comme dans le début du bâillement, larynx descendant mais flottant. Attention, point capital : aucun moment de latence entre l'inspiration et l'attaque. On aura l'impression que le son part d'une sorte de fond de cuve au début, mais ce n'est pas grave. Les anciens disaient : « Tu dois creuser le fossé de la voix ». Au début, cela peut parfois gratter un peu, c'est normal, passager, l'organisme va réagir momentanément en produisant plus de mucus. Ça va disparaître, car bien sûr, il y aura la plus grande surveillance quand à la fluidité absolue du souffle. N'oubliez pas que c'est un processus de construction évolutif. Soyez patient et persévérants. C'est ce point qui m'a troublé et dérangé durant des années, car on me disait, j'entendais tout le temps :             «  Attention, tu chantes dans la gorge, dans la cravate... ». J'ai compris ensuite, avec les recoupements et les études, qu'en fait, pour ne pas chanter dans la cravate, dans la gorge, il fallait justement faire tout ce travail « d'agencement » de la gorge. C'était ce travail qui conduisait progressivement et facilitait cette fameuse voix dans le masque.

 

On peut aider à identifier la sensation de l'ouverture de la gorge par le travail de la voyelle è dans le médium,(qui va très légèrement vers le e d’œuf). Attention à ne pas écraser, boucher, bloquer, reculer la langue. Tout ce travail doit se faire avec un dosage entre effort et relaxation, délicat à trouver, dans un flux d’air régulier et omniprésent. Le ou et le i, voyelles mères, de base, devront être travaillées afin de ressentir que le son ne monte jamais, que le son est toujours maintenu au même niveau. ATTENTION, ON NE BLOQUE JAMAIS LE SOUFFLE QUI RESTE TOUJOURS MOBILE ET FLUIDE. Lèvres légèrement ouvertes dans la première octave, comme si vous étiez ventriloque.

 

Super exercice pour trouver cette ouverture, également. Faites semblant de faire du jogging, sur place, en respirant bruyamment par la bouche, le fond de la gorge largement ouvert. Votre larynx est bas. Vous sentez l'air froid caresser les parois, ça vient de loin. Attaquez un ou, ou un o sans temps de latence aucun, sans pousser, avec une attaque nette. Pour ceux qui fustigent ce que je dis, allez écouter par exemple Nicalae Herléa en baryton, ou Amédéo Zambon en ténor. Vous me direz si l'ouverture de la gorge et le larynx en bas sont des fadaises. J'aimerai ici citer le grand Luciano Pavarotti: "...... The larynx must go down, deep, the singer must do exercices for built an impediment, on the air column....".  Le larynx doit descendre, profondément, le chanteur doit faire des exercices pour construire une impédance, sur la colonne d'air....".  C'est une video de master classe consultable par tout le monde sur youtube. Franco Corelli dit la même chose et aussi moult grands chanteurs. 

 

L'idée du ventriloque peut être intéressante. Les lèvres, en travaillant sur le OU ne s’entrouvrent que très peu. On travail toujours dans la zone de facilité bien sur.

 

Le larynx descend, mais la langue doit toujours rester hors de la gorge, devant et détendue, l'apex derrière les dents du bas. Courage, c'est long à construire, car tout le monde, je dis bien tout le monde, quand le larynx descend, au début, avale sa langue avec, et si on travaille cela seul, on a toutes les chances de faire une grosse patate, une grosse cravate. Il faut travailler devant une glace et toujours garder des voyelles claires et calibrées.

 

Pousser le son devant ne fait que perturber le flux naturel qui est semi vertical. Soufflerie, plis vocaux, pharynx et enfin, résonances de tête qui vont faire vibrer tout le crane. Plus un son remplit la tête, plus il remplit le théâtre. L'immense Franco Corelli, dans ses "last words", disait:  "...Qui pousse le son devant, tot ou tard, ferme la gorge...".

 

Pour trouver le juste « fossé » de la voix, le OU ou le O sont souverains. On ne peut chanter un aigu de manière sûre, sans avoir préalablement appris à construire cette « impédance » sur le larynx. Avec le minimum d'effort, bien sur. Les ténors Mario Filipeschi ou Amédéo Zambon sont dans le domaine très impressionnants.

 

Il ne sert à rien, pour obtenir et développer l'aigu, de faire beaucoup d'aigus. Le mécanisme de l'aigu se faisant bien avant l'aigu, on peut développer les mémoires musculaires jusqu'au haut médium, par exemple, FA pour un baryton et SOL dièse pour un ténor. Nous rejoignons ici le principe de ne jamais travailler dans le défaut ou le « non établi ». FAURE, dans sa méthode de chant célèbre, parlait de « son type ». Travailler dans le bon, le mieux, et l'étendre. Construire dans le facile, dans ce qui ne fait pas peur. En voulant absolument atteindre l'aigu, le chanteur non expérimenté, va créer des tensions, des obsessions, des craintes, et ces obstacles persisterons toute la vie du chanteur en lui faisant en fait perdre un temps fou. Moins il y a d’efforts, plus il y a d’efficacité plus il y aura la puissance facile. Le cercle vertueux prendra petit à petit la place du cercle vicieux.

 

La facilité est obtenue lorsque la force de bas en haut (pression sous glottique), provoquée par la compression du souffle, est équilibrée par la force de haut en bas (pression sus glottique), ou impédance ramenée, autrefois appelée aussi de manière empirique et approximative, couverture du son. Ceci consiste à avoir un mouvement inverse du larynx par rapport à la montée vers l’aigu. Il n'y a plus de hauteur, la totalité de votre ambitus vocal est au même étage,comme un archet sur la corde, rien ne monte, tout est soutenu et libre.

La vieille image « quand tu montes, penses que tu descends » prend ici tout son sens. Un aigu ne sera jamais facile et sûr si le larynx remonte. Le larynx remontant, tout l'espace se ferme !!

Le travail du « ou » est précieux et prend ici tout son sens. Le ou est la porte d’entrée de la voix de tête et la porte de l'aigu. Ne jamais ouvrir les sons sous peine de dysphonies. En cas de blocage du pied de langue, le « ou » peut être trop difficile, voire impossible, se rabattre alors sur le ô ou même l’enchaînement de voyelles ô â, et être patient en ne travaillant que le bas et le médium de la voix. Le y vous aidera à détendre la langue.

Laya,Léya, Liya, Lôya, Louya, Luya, sur la même note ; pleins de phonèmes sont possibles, toujours en ayant le soucis de l'indépendance de la langue (exercices de Tomy Leichtweis), sans crisper, avec mâchoire très peu ouverte et immobile (un petit crayon entre les dents), seule la langue travaille. Ne surtout pas faire cet exercice en ayant l'impression de manger du lapin cru. Toujours travailler dans la zone facile. Tout ceci est l'installation de mémoires musculaires qui sont parfois très longues à se mettre en place.

 

LES VOYELLES DANS LE TRAVAIL SONT TOUJOURS CALIBREES, JAMAIS GROSSIES. ON CHANTE AVEC L'ESPACE, PAS « DANS » L'ESPACE.

 

Le travail de l'ouverture de la gorge, tellement incontournable, est fastidieux pour ceux qui ne l'ont jamais envisagé, c'est une concentration mentale importante et un effort au début. Attention, un effort de concentration, de persévérence, mais pas de force à l'émission du son, ce n'est pas beugler !! Il est vraiment souhaitable que ce travail soit conduit par un professeur qui à l'habitude (ou qui a perdu et reconstruit sa voix plusieurs fois, lol). 

Le professeur est le guide pour toujours préserver de la zone rouge. Le travail de l'ouverture de la gorge est la clé de la facilité progressive et de la régularité dans la forme vocale. Celui qui n'a pas conscience de cela s'expose à des jours de forme et d'autres de méforme très marquées. Le lundi, on a une voix de stentor, le mercredi déjà, on ressent que l'on est obligé de pousser. On commence à racler. C'est très déstabilisant pour l'artiste en herbe. Le grand Melocchi enseignait cela. Si vous n'avez pas cela, vos aigus seront instables, pas sûrs. Vous serez obligé d'inventer tout un tas de trucs bizarres pour y arriver tant bien que mal. Le doute et le trac seront votre quotidien.

 

Attention. Je parle tout le temps de musculation, de travail d'ouverture. Tout cela se construit bien sûr avec le minimum de poids sur la gorge. Je fais des chanteurs, des musiciens, pas des gueulards qui deviennent écarlates au moindre aigu. Un larynx, des plis vocaux, c'est quelques dizaines de grammes. La musculature abdominale, c'est plusieurs kilos. Imaginez le mal que l'on peut faire à son instrument !!!...

 

Le flux de l’air doit être continu et jamais oublié. Le souffle est la corde à linge, les consonnes sont les pinces à linge. La pince à linge ne coupe jamais la corde.

Un excellent exercice consiste à faire un petit moulin devant sa bouche avec ses mains quand on chante, vous constaterez que la fluidité de l'air est meilleure. 

 

L'articulation et la résonance soulagent le larynx, c'est capital.

 

Ne cherchez pas à mettre la voix dans le nez, à chanter au travers du nez. Certes, il peut y avoir une « répercussion nasale », vers les pommettes, mais c'est tout. La résonance optimum est obtenue en premier par un bon accolement des plis vocaux et le respect du calibrage des voyelles (jamais de son oua oua, grossit). Toujours rechercher l'équilibre phono résonanciel idéal. Ensuite, quand tout se passera bien au niveau de la gorge, de la langue… le son montera en tête et celle-ci sera remplie de vibrations qui pourront se situer dans le haut du visage. Le masque est une conséquence, non un but. Souvenez vous, qui pousse et force la voix devant, tôt ou tard ferme sa gorge. Ne pas se soucier du masque au début, quand on construit une voix, c'est le meilleur moyen de faire des crispations supplémentaires. De plus, l'humain n'a pas la capacité à penser à plusieurs choses à la fois, donc, déja, si vous vous concentrez sur le travail de l'agencement de la gorge et de la place de la langue, ce sera parfait, et cela vous occupera pendant plusieurs mois, et parfois, plusieurs années. 

 

On chante avec l'espace, pas « DANS » l'espace. Je dis ceci car si votre voyelle est grossie, elle occupe l'espace, votre langue part en arrière et s'enfonce et vous chantez dans une grosse patate, une grosse cravate. Le son n'a plus aucune portée, il est très fatiguant et votre voix bougera très vite. Il n'y a alors plus aucune résonance de tête. Ceci peut faire dire par exemple, qu'une femme est mezzo, alors qu'elle est soprano.

 

La langue. La langue est un des principaux acteurs dans la production du son. Elle doit impérativement rester souple, petite et devant. Si la moindre contraction est présente, si elle part en arrière, fait un pain dans la bouche..... alors tout le son est perturbé. Il passera en dessous du masque au lieu de l'utiliser. Le flux du souffle sera bien meilleur avec une langue qui fait son travail de manière juste et détendue et le son sera calibré de manière juste et non grossi. Une langue grosse en son pied, crispé ou, et, qui recule, peut donner l'illusion d'une voix dramatique, alors qu'il n'en est rien. Attention, la langue souple ne perturbe en rien la liberté du tuyau sonore et son ouverture. Le larynx descend, la langue est hors de la gorge.

 

Attention, j'ai remarqué que beaucoup d’élèves faisaient le N avec la langue entre les dents. Le N, se fait la langue au dessus des incisives, en haut, ce qui créer moins de tensions.

 

Il n’y a pas de méthode, il n’y a que des exceptions. Chaque élève est unique. Si vous trouvez un geste vocal unique chez Kraus, Bergonzi, Corelli, Domingo, Di Stefano ou Schicoff, faite moi signe…. Le seul point commun entre eux est que le larynx est en bas dans l'aigu, avec une impédance ramenée qui leur assure une sûreté absolue de leur quinte aiguë.

 

Les voyelles doivent être calibrées, jamais grosses. Si elles sont grosses et pâteuses, c’est quelles tombent dans l’espace arrière. Le i est alors le remède. On peut lui adjoindre un Y pour aider à ne pas enfoncer la langue. On chante avec l’espace, pas dedans.

 

Le travail du GN (comme dans ESPAGNE),aide à fixer la position de la langue et donne une idée de la zone de retentissement, de la résonance résultante finale. Attention, le GN n'est pas le N. Le geste correct se fait avec l’arrière de la langue qui colle au voile du palais, la pointe restant devant. Comme dans ESPAGNE et surtout pas ESPANIEU. Ce travail mélangé au travail des voyelles ô et ôu est la clé dans la plupart des cas.

 

Ne pas faire chanter l’élève au travers du nez. Il aura toutes les peines du monde à s'en défaire, car il s'entendra beaucoup et aura l'impression d'avoir une grande voix. L'explication est simple, lorsque la voix est dans le nez, le voile du palais est effondré et le son retentit dans les trompes d'Eustache, porte de l'oreille interne.

Dans ce cas, pour le chanteur, la voix est grande, il se gargarise d'un son qu'il voudra toujours plus brillant et fort pour lui, mais en fait, la voix ne portera absolument pas. C'est le meilleur moyen d'avoir une voix qui devient de plus en plus dure et toute nuance deviendra progressivement impossible car le pianissimo se fait avec un grand espace arrière.

 

La langue doit absolument être indépendante de la mâchoire avec l’apex devant. Il n’y a pas plus gênant pour l'auditeur, que de voir un chanteur manger du lapin cru quand il chante (articulation excessive impliquant de grands mouvements de mâchoire.)

 

L'ouverture de la bouche doit se faire progressivement. Grave, médium, bouche très peu ouverte. Ensuite, elle commence à s'ouvrir à la porte de l'aigu. L'espace arrière va être de plus en plus large et profond. On a alors la sensation que la voix part haut dans la tête et on imagine l'aigu vers l'occiput. Caruso disait qu'il pouvait faire un contre ut avec la bouche pratiquement fermée. Normal. Si les différentes parties de la bouche (langue, mâchoire, gorge) sont identifiées et indépendantes, alors, à l'inspiration, l'espace du fond est facile et la voix résonne, sans avoir besoin d'ouvrir. Si, dans le cas contraire, on ouvre grand la bouche dans le grave et le médium, cela met en péril l'ouverture arrière, et cela vous fera une voix totalement privée des grandes résonances de tête. Attention, le larynx reste en bas dans une gorge grande ouverte. Pour l'aigu, j'utilise l'expression : « il y a trop de monde dans le petit salon, il faut ouvrir les portes du grand salon », en référence aux grands appartements Haussmanniens qui avaient plusieurs salons en enfilade.

 

La voix vient du moteur que sont les cordes vocales. Chanter l’archet à la corde est la base. Le but est d’éliminer tout ce qui nuit à cette vibration qui doit être la plus pure possible, sans sérrer.

 

Le N peut apporter beaucoup dans le travail de la résonance, mais attention. Le N doit être fait avec l'apex collée à la base des incisives, en haut. Si votre N est fait avec la langue entre les dents, alors cela va engendrer un serrage laryngé mortifère pour la voix.

 

Toutes les voix doivent savoir vocaliser, triller, chanter piano, crescendo diminuendo… C’est un entraînement important qui développe considérablement le chant et lui donne une sûreté sans égal. Ce travail est progressif dans le temps. Voir Panofka, Concone, vaccai et autres cahiers de vocalises.

 

Le psychisme est capital. La voix reflète l’histoire de l’élève et certaines épreuves personnelles rendent impossible l’épanouissement d’une voix. Cela peut multiplier le temps des études par deux ou trois. Seule une psychothérapie avec une personne qualifiée et de grande expérience pourra débloquer certains défauts vocaux très ancrés. Attention, un professeur de chant n’est pas un psy, chacun sa compétence, et un élève n'est pas un enfant ni un pote. Le respect de la distance avec l'élève évite certaines situations qui peuvent être ambiguës et/ou très douloureuses. A ce sujet, je souhaite raconter une histoire qui m'est arrivée. J'avais une élève qui n'arrivait pas à utiliser le bas de son corps. Elle chantait comme une enfant. Au bout de quelques mois, je me suis décidé à lui dire que le problème provenait peut être d'autre part, et qu'il serait opportun d'en parler à un psychologue. Malgré le tact dont j'essayais de faire preuve en lui disant cela, elle se fâcha et partie en claquant la porte en me disant que j'étais nul comme prof. Quelques mois plus tard, elle me recontacta et m'avoua quelle avait été abusée sexuellement par son beau père durant des années. Ceci expliquait le fait qu'en dessous du nombril, elle ne ressentait rien, que le périnée était bloqué et que tout le bas de son corps était « mort ». La psychothérapie, et, accessoirement l'EMDR l'avait libérée. Et vous savez quoi ? C'était en fait une grande voix de mezzo soprano. Elle a réussit à contacter son corps, à l'utiliser, à construire la colonne d'air. Il n'y a pas le corps d'un coté, et la tête de l'autre, il y a l'humain dans sa globalité et toute sa complexité. 

 

Chanter clair n’est pas chanter serré. L'expression « chanter calibré » est pour moi plus adaptée. Être un funambule au dessus du gouffre de Padirac, me semble une image assez fidèle du calibre de la voyelle et de l'agencement de l’espace situé à l’arrière de la langue.

 

Le travail du chanteur ne doit pas être de « placer », car cela engendrera des perturbations au niveau laryngé qui ne feront que vous conduire à une impasse. Le travail du chanteur est de libérer tout doucement le son sur toute l’étendue vocale, comme on sort le métal de sa gangue, notamment avec le travail d'assouplissement perpétuel du pied de langue. On doit toujours viser le maximum d'aisance, sur toute la tessiture. La voix « sonnera » » progressivement au bon endroit, par le travail des bons exercices, choisis par le professeur en fonction de la nature de l'élève.

 

Je place ici un petit laïus de mon ami Christian Guerin, chercheur, formateur d'orthophonistes et professeur de chant:

 

"De 20 à 40 ans, enroué de façon chronique dès que je chantais, j’étais contrarié de constater que sur les marchés de Paris ou dans la rue, les vendeurs qui criaient étaient eux aussi enroués alors que dans l’Ariège où ma femme m’emmenait dans son village, on criait, chantait, hurlait avec de belles voix. Je n’avais trouvé aucune explication rationnelle.

Je me souviens du petit rôle de l’orateur dans la « Flûte » où le chef me disait « cupo, cupo » mais même le directeur Philippi était incapable de m’expliquer ce que je devais rectifier. J’avais déjà travaillé avec Pierre Thau, René Bianco, Ugo Ugarro sans résultat. Ils me faisaient chanter en basse.

 

Madame Gaches m’a pincé les joues, tiré vers elle et décollé les lèvres des dents… et le miracle arriva ! ! !  L’impédance se fit dans cette nouvelle petite cavité. Maurice Brach y ajouta la descente du larynx dans le cou, augmentant le formant grave et sa bascule. Tous ces phénomènes étaient connus depuis la fin du 18°, enseignés durant tout le 19° et mis scientifiquement en évidence au 20° par le Suédois SUNDBERG, question d’ondes de longueur supérieure à la distance de la glotte aux lèvres.

 

Ces ondes de plus de 15cm représentent le « formant du chanteur », au-dessus de 2.000 Hertz. Tu rallonges cette distance, le retour se fait, tu raccourcis, ce sont les petits muscles des cordes vocales de 2X2 grammes qui doivent supporter la pression de sortie d’air comprimé par tes muscles abdominaux de 4/5kg ! !  Tout con, c’est logique. Mais tout çà tu le sais et le pratique. Mais sur internet et Youtube, que de conneries enseignées.

Quant au piano dans l’aigu, c’est couvert au maximum pour décontracter les c.v., les amincir jusqu’à pouvoir passer en voix de tête M2 Summum musical…."

 

 

 

Le travail des voyelles est capital. Elles doivent s’enchaîner sans resserrage de l'espace intérieur. Ainsi, oû, a i é doivent être enchaînées sans modification de l’espace arrière, avec la pointe de la langue (apex) qui reste devant, L'agencement interne de la bouche varie bien évidemment car la forme de la langue n'a rien à voir pour A ou un I, mais en aucun cas, l'ouverture de la gorge ne doit se modifier ni se rétrécir. Gola aperta et suono coperto !!!

Pour un élève, construire les voyelles correctement sera difficile. Les voyelles opératiques, lyriques, ne sont pas les voyelles habituelles parlées. Faire des I gorge ouverte semble bizarre au début, mais c’est le chemin pour comprendre et ressentir, conscientiser le conduit vocal, ressentir enfin la voix qui de cette manière sera portée par l’air. Finie la fatigue.

 

Il faut travailler régulièrement. Tout le monde comprend les difficultés de devenir violoniste, mais pas de devenir chanteur. C’est pourtant aussi difficile sinon plus, car on ne voit rien, on travaille uniquement à la sensation. Pour comble, on n’entend pas de l’intérieur, ce que l’auditeur entend.

 

Le mode mineur incite à la descente du larynx. Pour inciter à la bonne position vocale dans une gamme ascendante, penser gai dans le grave et de plus en plus triste en montant. Le sentiment génère la position du larynx. Tristesse : descente, joie : montée. Le sanglot peut aussi aider.

 

Il y a deux grandes directions dans le travail et la construction d’une technique vocale. Il y a les voix en A et les voix en I. Une voix en A est une voix qui a une tendance au serrage, au "sur timbre", à tout ce qui rétrécit. Cette voix travaillera donc sur le A, sur le dégagement, l’ouverture, l'espace.

Une voix en I est une voix souvent grossie, qui manque de timbre. Une voix que j’appelle oua oua. Cette voix travaillera sur le I pour concentrer et renforcer l’accolement qui est noyé dans un flot de parasites nuisibles.

Entre ces deux extrêmes tout existe. Le professeur est seul guide.

 

Il faut travailler tous les jours, même quelques minutes. Les mémoires musculaires ou mémoires kinesthésiques, mémoires des bons gestes sont longues à s’installer. A titre d’exemple, il faut deux mois, à partir du moment ou l’on ne fait plus un geste réflexe mauvais, pour mémoriser le nouveau geste salutaire. Compte tenu que lorsque l’on apprend, on fait plutôt dix fois le mauvais pour une fois le bon, je vous laisse imaginer ce qu’il faut comme temps, pour qu’un geste soit acquis. Je parle d’acquisition en toute circonstance, y compris lorsque l’on est mort de trac, en audition, concours, examen ou concert.

Quand au début je dis qu'il faut travailler au moins quelques minutes par jour, c'est pour les amateurs, car ceux qui se destinent au monde professionnel doivent travailler comme des damnés. A titre d’exemple, Mady Mesplé que j’ai bien connue, qui a été mon professeur pendant 3 ans, travaillait avant une production, 8 heures par jour avec Janine Reiss.

 

Changer de professeur souvent est une grosse erreur. On s’aperçoit finalement un jour que l’on a persévéré dans aucun geste et que rien n’est solide ni installé. Quand on a trouvé celui ou celle qui vous fait faire des progrès, on reste avec. Ensuite, c'est un chef de chant qui vous guidera plus loin musicalement.

 

Un petit mot quand même sur l’interprétation. Sachez que l'on ne pourra pas parler d’interprétation d'une œuvre, tant que votre technique ne sera pas faite. En effet, comment faire un piano, un trille, un diminuendo, un legato parfait, tant que votre corps ne sera pas prêt à le faire.

 

Quand la voix est prête, il faut aller voir un pianiste chef de chant dont c'est le métier et qui aime les chanteurs, comme cela à été le cas pour moi, avec Simone Féjard, Nadia Gedda ou Claudie Martinet. Alors, vous vous apercevrez qu'en respectant religieusement les indications et l'intention du compositeur et du librettiste, vous deviendrez un interprète. Vous deviendrez artiste. C'est votre âme, ce que vous êtes au fond, qui inscrira dans le marbre votre propre interprétation. Le travail du musicien professionnel est colossal. J'affirme que si le travail est fait comme il se doit, on se rapproche des cadences de travail des grandes écoles, comme médecine. Il faut en effet apprendre et travailler tous les jours : La technique vocale, le piano, toute la formation musicale, dont le solfège et l'harmonie ainsi que les langues. Avoir une culture musicale et générale en béton. Bref, il faut être un passionné du chant, du chant dans sa globalité, dans son moyen de transcrire les grandes œuvres du répertoire. Si seule la technique vous intéresse, ça n'a aucun intérêt.

 

Ne jamais confondre sentimentalisme et interprétation. Seul le travail compte. Si vous voulez chantez rapidement, sans effort, sans travailler consciencieusement, sans chercher , sans persévérance, sans patience, alors le chant n'est probablement que le badge de votre ego. Je parle ici bien sûr toujours du professionnel en devenir, et non pas des amateurs. Commencer à interpréter quand on déchiffre ou que l'on connait à peine une œuvre que l'on a appris sur youtube est totalement inintéressant et contre productif. Au contraire, si vous soignez le travail de table, devant votre partition, en déchiffrant, en étudiant votre partition, le contexte de la composition, le compositeur, alors, vous acquerrez une méthode infaillible qui vous donnera une efficacité de plus en plus grande. Au départ, ce sera difficile, mais avec le temps, vous irez plus vite et vous serez plus efficace.

 

La voix seule n’est rien. J’ai connu des surdoués vocaux, obsédés par la technique, se reposant sur leur belle voix. Ils ne font et ne feront rien dans le métier. Ils n’aiment pas la musique, seulement la performance. Obsédés par la "place", ils oublient le principal, l’amour du chant, de la musique, du compositeur. Ils ignorent tout de l'âme, de l’émotion, de l'émoi provoqué par les grandes œuvres vocales. Ils se servent de leur voix pour "exister" et "prouver" aux autres. Ils ne montrent que leurs névroses. Seules l’abnégation et l’humilité, assorties d’une grande intelligence et d’une grande volonté sont la clé. D'une manière générale, la voix, c'est 10% de l'artiste. Le reste est une répartition entre travail, intelligence, patience et chance. Le piston peut aider pour les auditions, mais sur scène, on est seul, et si on est mauvais, on n'est pas ou plus engagé.

 

Tout le savoir s’acquière avec le temps, dans une volonté, une régularité inflexible mais non obsessionnelle, car une volonté obsessionnelle, névrotique, vous conduira à la catastrophe et au rien du tout, au néant. Comme dans toute entreprise, travailler beaucoup mais dans un grand lâcher-prise est important. La pensée, la concentration, c'est ici et maintenant. Hier, on n'y peut plus rien, demain, on n'en sait rien. Toujours l'esprit là ou vous vous trouvez, dans ce que vous faite à ce moment. 

 

Lorsque l’accolement des cordes est parfait dans une gorge largement ouverte mais détendue, lorsque les voyelles sonnent de manière optimum, que la langue a enfin trouvé sa juste place avec un pied qui n'est pas crispé, que le tuyau sonore ne subit aucun trouble, alors, se produit le phénomène de la résonance de tête. Une sensation que le haut de votre visage rentre en vibration, en résonance. Malheur à vous si vous voulez forcer ce phénomène, car nous rentrerons alors dans la volonté de placer dont je parlais au début.

 

Sur l'indépendance entre la mâchoire et la langue. Il faut acquérir progressivement la conscience de chaque partie du corps qui sert l'expression du chant. Ainsi, la gorge, la langue, le voile du palais, les mâchoires doivent être conscientisés. La langue et la mâchoire doivent être indépendants. Il n'y a rien de plus néfaste que de donner à l'auditeur la sensation que l'on mange du lapin cru lorsque l'on chante. En effet, si la mâchoire est sollicité de manière inapproprié pour l'articulation, ceci nuira au retentissement du son en tête et surtout, au legato. La compréhension du texte en souffrira. Si l'on enchaîne par exemple les sons GA YA, plusieurs fois sur une même note dans le bas médium, sans bouger la mâchoire, en se servant uniquement du travail de la langue, ceci donne une idée du but à atteindre. Fait correctement, les enchaînements de phonèmes sont souverains pour atteindre ce but. Le professeur préoccupé par cela saura quels exercices faire. En général, il faut travailler cela devant un miroir, car l'on ne se rend pas compte du fait que même si l'on décide de ne pas remuer la mâchoire durant ces exercices, on constate devant le miroir quelle bouge quand même.

 

Il ne sert à rien d'ouvrir la bouche pour ouvrir la gorge. C'est même le meilleur moyen de fermer la gorge.

Je redis qu'il faut conscientiser ces zones, de manière à ressentir que l'on peut largement ouvrir la gorge, sans même ouvrir la bouche et sans même crisper la mâchoire. 

 

Ce qu’il faut faire est finalement simple. Trois lignes. Ce qu’il ne faut pas faire, par contre, trois volumes.

 

Pour ma part, souvent, je ne travaille dans un cours lors de la technique, qu'une partie du geste. Par exemple, certains cours, nous travaillerons la respiration (pour ceux qui ont une respiration inversée en soulevant les épaules). A un autre cours, je travaillerai l'ouverture de la gorge, lors d'un autre, le retentissement du son, et ainsi de suite. Je compare cela à la formation musicale, qui comporte de la lecture de note, du rythme, de l'intonation, de l'analyse….. Tout cela à pour but de faire un bon musicien. Eh bien pour le chant, c'est pareil, tout cela à pour but de faire un bon chanteur. J'en suis venu là car il est impossible de penser à tout à la fois. Ainsi, il est profitable de séparer, au début en tout cas, les difficultés. Les mémoires musculaires s'installent ainsi de manière bien plus efficace. La persévérance et la patience font le reste.

 

Le trac se combat par l'assurance et la sûreté dans ce que l'on fait. Seul le travail vous donne cette assurance. Quand vous avez réussi mille fois quelque chose, vous n'avez plus peur. Ne pas accepter des œuvres pour lesquelles le corps n'est pas prêt. Toujours respecter sa nature et là où en est notre musculature. La bêtise parfaite ? Un jeune ténor de 20 ans qui a commencé à travailler il y a un an et va chanter La Fanciulla del West ou Werther, tout ça car c'est un surdoué vocal et que sa voix est facile. Il le paiera au delà de tout ce qu'il peut imaginer. Quand on rapporte cela à la salle de musculation, c'est plus facile à admettre. Est ce qu'avec un an de travail en salle, vous essayeriez de faire un développé couché à 100 kg ? No comment... Idem pour une jeune soprano de 14 ans que j'ai entendue chanter la Reine de la Nuit. Tout un tas d'imbéciles en extase. C'est criminel.

 

Interpréter est une bêtise. La fidélité à ce que veut le compositeur seule doit être. Ensuite, avec la répétition et le travail, ce que vous êtes arrive tout naturellement. La volonté d'interpréter fera forcément ressortir ce que vous avez entendu et que vous copierez, même inconsciemment, en rajoutant plein d'erreurs. Fuyez Youtube pour le travail de fond. Ces mauvaises habitudes sont souvent l'apanage des débutants.

 

Je viens du milieu professionnel. Les premières fois que je me suis trouvé devant des amateurs, j'ai commis des erreurs. J'étais trop exigeant. Il est important d'adapter son comportement à qui nous avons en face de nous, et surtout, à la demande qui nous est faite. Autant un jeune qui se destine au métier de chanteur devra travailler énormément, avoir une exigence à toute épreuve et répondre sans broncher aux demandes de son professeur, autant un amateur demandera simplement d'apprendre à se servir de sa voix, et à prendre un grand plaisir dans la mesure du temps qu'il peut consacrer au chant. Ainsi ai-je dû apprendre à accepter qu'un élève amateur puisse mettre plusieurs semaines à apprendre une simple vocalise de Vaccaï ou de Concone. Je suis devenu plus souple. Toujours souligner ce qui est bien, encourager.

 

Quelqu'un qui vient vous voir et qui n'est pas débutant, aura peut-être une histoire avec un autre professeur. Quand j'étais jeune, je changeais de professeur comme de chemise. C'était une grave erreur. Combien de fois ais je entendu : « Vous ne savez rien, il faut tout recommencer ». Peut-on entendre phrase plus décourageante ? Un élève ne sait rarement rien, car même s'il est dans l'erreur, l'erreur est déjà un savoir. On poursuit la route, on ne refait pas.

 

Dichotomie curieuse. On n'en a jamais autant su sur l'appareil vocal, et pourtant, lorsque l'on entend les enregistrements des anciens chanteurs, on a du mal à comprendre pourquoi de telles voix sont devenues si rares. Imagineriez vous aujourd'hui, un Nicolae Herléa, un Gianni Maffeo, un Franco Corelli ou une Birgit Nilsson ? Plus personne n'existerait et les gens reviendraient à l'opéra. Est-ce que leur professeur connaissait toute la physiologie de la voix ? Tout le fonctionnement du corps dans ses moindres détails ? J'en doute.

 

Le soutien du son se fait par les muscles abdominaux qui à l'expiration appuient sur les viscères et compriment le diaphragme. L'ouverture maintenue des côtes flottantes, permet un maintien du diaphragme et assure la pression de bas en haut nécessaire au chant. La cage thoracique doit être largement ouverte et l'attitude générale du chanteur doit être une attitude de fierté. Verticalité « courtoise », non exagérée ni tendue. On chante pour le poulailler. A adapter à la physionomie du chanteur. Une nuance pédagogique. L'apprenti chanteur doit travailler le plus possible, le plus bas possible, en apprenant à ressentir toute la zone pelvienne, capitale dans le geste phonatoire. Tout cela s'installe avec les années.

 

Les vieux disaient « chante bien, et tu respireras bien ». On arrive à ce niveau de compréhension quand la voix est libérée et que les obstacles de la gorge ont été vaincus. Le paragraphe d'avant n'est nullement contradictoire. C'est simplement que le travail est fait, les mémoires installées.

 

La voyelle principale pour le travail de construction de la voix est le ou. Toutes les autres découlent du OU, toutes les voyelles naîtront du OU. C'est tellement capital aussi pour les femmes. La voix de tête se développe par le ou et le O. Le OU est souverain. Au début, on a du mal, c'est pour cela que l'on doit rester impérativement dans la zone d'absolu confort. Petit à petit, le fossé de la voix se construit, et l'aigu, une fois le larynx en place, arrive.

 

Les attaques. Une attaque doit être pure, précise, ferme mais sans à-coups. Le travail des attaques doit se faire très tôt, comme dans une surprise : « ….Ah, mon ami, comment allez vous ?.... ». Les attaques doivent être travaillées un peu à chaque leçon au début.

 

Le travail des vocalises. Un chanteur doit savoir vocaliser, du soprano le plus aigu, à la basse la plus profonde. Lorsque l'on rencontre des difficultés sur une vocalise, il faut la travailler dans différents rythmes. D'elles mêmes, les difficultés s’aplanissent et la précision arrive.

 

Le trille. Commencer par des intervalles de secondes, en noires, puis en croches, puis en doubles, puis en triples. On accélère progressivement.

 

L'accolement. Il doit être ferme mais toujours sans forcer. Le but, c'est d'avoir progressivement de moins en moins de « poids » sur les cordes.

 

De la nécessité du travail piano. C'est indispensable. Le crescendo diminuendo doit faire partie de la panoplie technique du chanteur. De plus, le piano est souverain pour la santé vocale et l'éducation du chanteur. Pas tout de suite bien sûr. Au début, on laisse chanter, on libère, pas fort, mais on n'ajoute pas le souci des nuances au chanteur. Ça viendra vite. De là tout l’intérêt du travail des vocalises genre panofka qui sont tellement bien étudiées pour les chanteurs, dans l'étendue de la voix et dans les nuances.

 

 

 

Pascal Aubert

 

 

Je mets ce recueil à la disposition de tous, les commentaires constructifs et bienveillants étant les bienvenus.

Ce petit « mémo technique » est en perpétuelle évolution et s'étoffe de semaines en semaines.

Ici, seul le chant et l'intérêt des élèves doit primer. Notre égo ne doit pas trouver place dans notre métier de professeur car celui-ci nuit à l'accroissement de notre savoir.

 

Bardenac

Mars 2025

 

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